Pauvres créatures : l’étrange Odyssée d’une Frankenstein féministe

Inspirée de l’œuvre d’Alasdair Gray, « Pauvres créatures » est l’histoire de Bella Baxter, une femme ressuscitée après s’être fait greffer un cerveau de bébé. Elle doit tout réapprendre de la vie, traçant la route vers sa liberté par la découverte du langage, des émotions, de l’amour… et du sexe

« Du sexe à gogo », « Ne jamais montrer ce film à vos enfants », « Un sentiment de malaise » sont autant d’exclamations qui pourraient fuser après avoir vu « Pauvres créatures » … Parce que le dernier film de Lanthimos décolle la mâchoire ou « en bouchera un coin » à certains ! Il s’agit de l’histoire surprenante de Bella, une jeune femme ramenée à la vie par un brillant médecin qui va vivre un temps sous l’emprise de ses différents amants, la privant de liberté ou d’évasion… Mais guidée par son désir de conquêtes et sa soif d’aventures, elle découvrira progressivement les mœurs de la société, la place qu’y occupe la femme et son émancipation possible… Un ovni cinématographique.

Encore une fois, Yorgos Lanthimos transmet un vrai message dans son film. À travers son long-métrage, il critique le patriarcat et remet en question les failles de la communauté victorienne et moderne.
Le réalisateur provoque et déroge aux incessantes règles établies par Hollywood. Eh oui… avec du sexe ! Que ce soit par des scènes prudes ou dérangeantes, elles sont néanmoins nécessaires pour illustrer l’émancipation de la femme dans notre société. Nombreux sont les films transmettant un message apologique du féminisme, trop souvent stupide et forcé. « Pauvres créatures » prend de la hauteur sur notre monde et glisse par subtilité ce qu’il devrait être en réalité.

Mais un film, ne peut se définir uniquement par ses discours véhiculés. La direction artistique est bluffante, le spectateur est plongé dans un univers à mi-chemin entre l’époque baroque et l’univers futuriste. Un voyage à travers des tableaux fantastiques et des décors couleur pastel, laissant une place prédominante à notre imaginaire. La mise en scène de Lanthimos impressionne une nouvelle fois, enchainant plans larges, plans oculaires, travellings, nous permettant de mieux comprendre les intentions, les points de vue des personnages et du réalisateur. Une direction artistique changeante donnant une valeur intemporelle et universelle au film.

Si nous sommes bien embarqués dans cette odyssée, c’est aussi et surtout grâce au talent des acteurs, particulièrement celui d’ Emma Stone dans le rôle de Bella Baxter, désarçonnante d’habilité et d’ingéniosité d’acting. L’actrice de « La La Land », s’est considérablement impliquée dans ce film, notamment avec ses nombreuses scènes de nudité. Par son interprétation de Bella, l’américaine donne, plus que jamais, vie à son personnage, et permet de mieux comprendre son évolution sociale. Tout cela avec pétillance et sincérité… Une performance magistrale récompensée dernièrement aux Golden Globes. Et il semblerait difficile d’imaginer l’Oscar de la meilleure actrice lui filer entre les doigts en mars prochain.

Parfois inconfortable, souvent déchirant, constamment jubilatoire, « Pauvres créatures » est une merveille de cinéma aussi précieuse que la performance magistrale d’Emma Stone. Le résultat est éblouissant, provocateur, féministe, libérateur et porté par un casting fantastique.

7,5/10

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