« La zone d’intérêt » : l’extrême banalité du mal

Les murs de béton ne peuvent retenir les cris et les larmes, quand le chant des oiseaux laisse la place aux bruits des balles.

« La zone d’intérêt », adaptation du roman de Martin Amis paru en 2014, est le dernier long métrage de Jonathan Glazer. Il rentre dans l’intimité de la famille de Rudolph Höss, directeur du tristement célèbre camp de concentration d’Auschwitz Birkenau. Une famille aux mains visiblement propres et à la conscience terriblement sale. L’histoire d’un foyer bâti aux portes du plus grand camp de la mort, habitué aux funestes bruits de cette gigantesque usine à tuer.

Un film froid, glacial, construit de plans pour la plupart fixes, lent, relatant l’ennui, la grisaille d’une vie qui n’en est pas une. L’autopsie psychologique d’un crime contre l’humanité. Une opération à cœur ouvert du mal dans son quotidien. Le film se distingue par l’absence totale de scènes d’horreur, les spectateurs ne voient ni le sang, ni les larmes couler. A l’instar de la famille du directeur, on ne peut qu’entendre et imaginer…

Le long métrage de Jonathan Glazer c’est aussi la vie d’Hedwigd Höss, froidement interprétée par l’extraordinaire Sandra Huller, une femme qui se ment, qui croit être heureuse. Un scénario, d’une justesse chirurgicale, sans fioritures, qui se contente, pour le meilleur, de dresser le portrait de la vie d’un couple qui ne s’aime pas ou qui ne s’aime plus.

Ce film détruit, en une heure et quarante-six minutes, le fantasme que le grand public construit quant au quotidien des pires êtres de notre monde et met en image ce qu’Anna Arendt conceptualise comme « la banalité du mal ».

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