Paul Molac : Arzao Hag Arzam ! *

Paul Molac est un engagé politique. Président d’associations, président de comités, député depuis 2012, il est entré en politique par la petite porte et le revendique…. Mais n’est-ce pas ce qu’on demande à un député ?  Détenir des savoir-faire tout autant que des savoir-être, l’humilité, le terrain, le sens du collectif et des responsabilités, bref une politique de proximité qui se fait rare. Bien plus qu’un parti pris, pour lui il s’agit d’une idéologie. Son ancrage breton, ses racines rurales, sa passion pour l’histoire et son combat pour les langues régionales pourraient peut-être expliquer sa ligne de conduite.

D’ailleurs à la rencontre, Paul Molac nous a directement mis dans le bain…

Nous avons rendez-vous à Ploërmel, un jour d’hiver, quand une manifestation d’une trentaine de personnes s’invite devant sa fenêtre. Ni une ni deux, il s’empresse d’aller à la rencontre, échange avec tous, veut comprendre les revendications « c’est mon rôle d’écouter tout le monde, je ne porte pas de jugement de valeur ni sur le millionnaire ni sur le smicard, je suis là pour les recevoir tous de la même façon ».  Et cela ne date pas d’hier… A l’écoute et soucieux des droits de chaque citoyen, Paul Molac a toujours voulu se rendre utile.

Né pour être engagé

Dès l’âge de 17 ans il s’engage dans le milieu associatif afin de défendre les langues régionales pour finalement participer à la création de classes bilingues « la diversité linguistique est très importante pour moi ».  D’un engagement à l’autre, il devient vice-président et président de multiples associations. Du côté professionnel, ce breton a toujours fait rimer mission avec passion. Fils d’une famille de paysans, Paul Molac suit le même parcours que ses ainés en devenant à son tour agriculteur qu’il décrit comme « un métier honnête ». Puis, changement de cap à 180° degrés pour ce passionné d’histoire qui reprend ses études et devient enseignant au lycée-collège de Brocéliande avec un idéal, rétablir certaines vérités historiques oubliées selon lui ! « La culture bourgeoise est omniprésente dans le milieu scolaire, c’est important d’enseigner d’autres versions, comment voulez-vous que l’enfant se construise sinon ?  »  Et ce n’était pas la visite d’un inspecteur qui allait l’arrêter… Qu’il soit là ou non, peu importe, sûr de lui et muni de documents officiels, le professeur Molac est à l’aise dans ses bottes et n’a pas peur de l’avis que l’on peut se faire de lui « il ne m’a rien dit lorsque j’ai fait mon cours sur la chouannerie et de toute façon il ne pouvait pas. Je ne suis pas sûr que cela lui ait plu mais ce n’est pas grave ». Une force de caractère qui explique sans aucun doute son arrivée au poste de député quelques années plus tard. Ayant gravi les échelons, ce breton prend du recul sur ses fonctions d’aujourd’hui « me voilà député du Morbihan, vous voyez ça ne s’arrange pas (il rit), il faut avoir un peu d’humour ça ne fait pas de mal, il y en a tellement qui se prennent au sérieux ». L’ancien agriculteur garde les pieds sur terre et n’oublie pas qu’être au service des autres reste pour lui la qualité essentielle à avoir peu importe la profession que l’on exerce « les gens diront que député c’est vraiment fabuleux, vous savez, je préfère un bon balayeur qu’un mauvais député ».

« Je ne serai pas l’agent du gouvernement »

Un état d’esprit qui guide son quotidien et ses choix politiques et qui l’a d’ailleurs poussé à quitter le parti LREM pour créer un nouveau groupe : Libertés et territoires. « La première année le gouvernement n’écoutait personne, ni les élus, ni les syndicats, c’était la négation des corps intermédiaires », et l’homme aux fortes convictions ne pouvait suivre une majorité qui ne voulait pas exprimer les souhaits de la population, mais au contraire, leur dicter une manière de penser « pour moi c’était hors de question ! Je voulais bien être leurs yeux et leurs oreilles sur le territoire mais certainement pas leur porte-voix. Je ne serai pas l’agent du gouvernement, ce n’est pas mon travail ! ». Paul Molac se souvient encore d’une collègue assise à côté de lui à l’Assemblé Nationale, une jeune femme économiste faisant partie du club des 30. Aucun lien avec le club des 27… Non, celui d’une trentaine de trentenaires à 30 kilomètres de Paris qui disait à tout le monde ce qu’il fallait faire. Cette jeune dame voulait que le député ne pose aucun amendement et qu’il vote une loi sans rien dire. Ce n’est pas à Paul Molac qu’il fallait dire ça… « Je lui ai alors répondu clairement de faire ce qu’elle veut, j’ai voté et présenté des amendements pendant cinq ans, je n’ai jamais demandé à quelqu’un si ça lui faisait plaisir et je peux te dire que je vais continuer ! On ne me demandait rien, juste de voter et de la fermer ».

Le patron du breton

Droit dans ses bottes, il y tient, pugnace aussi mais surtout curieux. Jeune, une question tournait en boucle dans sa tête : Pourquoi en Bretagne entendons-nous si peu parler du breton ? « J’ai lu un livre sur l’histoire de Bretagne et j’ai compris ». Pour lui, les diversités culturelles ont subi un ethnocide, les hommes auraient perdu la conscience de leur culture, auraient oublié qu’ils sont bretons. Paul Molac est persuadé qu’il ne faut pas se laisser faire « on voit bien que les langues correspondent à quelque chose pour les territoires, quelque chose de culturel, les gens n’acceptent plus qu’on les maltraite même s’ils les parlent de moins en moins. Elles sont bien plus que des vecteurs de communication, elles portent une communauté ! ». Selon le député, les enjeux sont beaucoup plus grands, c’est une question de droit de l’Homme « il ne faut pas oublier ce que l’on est, je suis persuadé que si l’on ne sait pas d’où l’on vient, on ne peut pas savoir où l’on va ».  Son combat a d’ailleurs été consacré plus récemment avec le vote de la loi Molac. Une belle avancée pour la protection du patrimoine régional ! Toutefois, Paul garde la tête sur les épaules et reste humble « cette loi ne tient pas à un seul député, peut être que j’ai fait ce qu’il fallait au bon moment et au bon endroit mais si les collègues n’étaient pas d’accord, je n’aurais rien pu faire ». Le député Molac espère désormais que sa loi servira. Confiant, serein, il se représentera aux prochaines élections mais n’exclut pas toute possibilité d’un nouveau changement de carrière.

* Debout et Tenons

Loi Molac du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion. La proposition de loi apporte des mesures de protection et de promotion des langues régionales dans trois domaines : le patrimoine, l’enseignement et les services publics.

 

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