LABORATOIRE D’ANALYSE : UN TRAVAIL DE L’OMBRE

Secrétaire médicale dans un laboratoire de Questembert depuis 2003, Carole fait le point sur son travail notamment depuis la crise de la Covid 19.

Comment ça se passe depuis l’arrivée du Covid ?

On n’a rien vu venir et ça a été crescendo. Il a fallu s’habituer, s’adapter, et je ne vous cache pas que ça a été compliqué. Nos responsables ont réagi certes, mais de notre point de vue la mise en place d’un protocole est arrivée un peu tard. Jusqu’en juillet, rien ne bougeait et les conditions de travail devenant vraiment compliquées, le personnel du labo a dit stop. Il faut savoir que pendant toute cette période, on a géré le fonctionnement du labo et la cellule Covid sans moyens supplémentaires. Heureusement, depuis, une secrétaire et une infirmière ont été embauchées.

Comment faites-vous pour gérer ce surcroit de travail ?

La patientèle est toujours là, on a des gens qui sont suivis pour des cancers, du diabète, il faut que l’on assume cette demande. On donne beaucoup de notre personne je crois, on est une équipe très solidaire, on peut passer d’un rôle à un autre et s’entraider régulièrement dans la journée. Néanmoins, on se laisse envahir assez souvent. Le quotidien est quand même difficile depuis cette crise

En tant que secrétaire médicale, que pensez-vous des actions du gouvernement depuis le début de cette crise sanitaire ?

Je pense qu’elles se sont améliorées. Honnêtement au mois de mars dernier, quand ça nous est tombé sur le nez, le premier mois, sans masques, sans gel, avec des infos qui nous parvenaient des médias, c’était vraiment compliqué. Nos responsables et nous, l’équipe, avons dû tout mettre en place, nous débrouiller avec les pharmacies du coin pour les masques, avec des petites entreprises qui s’étaient restructurées et s’étaient mises à faire du gel. Honnêtement ça a été la patouille. Pour tout vous dire, au début, seuls les biologistes, les infirmières et les techniciennes avaient des masques, les gels, nous les secrétaires n’étions pas masquées. Et ça, ça a duré au moins deux mois voire trois mois.

Mais depuis des actions se sont mises en place ?

Certes ça grogne beaucoup, mais le gouvernement fait ce qu’il peut. C’est quand même assez inédit cette situation. Et puis à cela s’ajoute qu’en France, les procédures sont longues, on ne lance pas n’importe quoi comme ça, ce qui fait trainer les choses. Mais au final on est quand même dans un pays où l’on s’en sort pas mal, et même si les gens en ont marre de ce Covid, il est inévitable de prendre des précautions. Je peux comprendre la grogne du couvre-feu à 18H car on a l’impression que ce sont les gens qui bossent qui sont le plus impactés.
En ce qui concerne le déconfinement au mois de mai c’était un mal pour un bien ou un bien pour un mal mais je pense que c’était super important d’un point de vue économique.
La chose qui m’a agacée en tant que secrétaire c’est que, quand les mesures étaient données à 20H, le lendemain à 8H on avait tous les appels disant « on veut des tests PCR, on veut des sérologies PCR » alors qu’ils n’étaient pas forcément disponibles sur le marché ni au sein des laboratoires privés comme le nôtre. Nos responsables ont dû mettre des plateaux techniques, mettre en place les PCR, acheter les machines nécessaires, mettre les moyens humains en place. Il a fallu résoudre certains problèmes et palier ces demandes. On aurait préféré que ce soit géré un peu plus en amont avec les professionnels de santé, afin de leur laisser le temps de tout mettre en place et de pouvoir assumer et répondre à la demande.

Même si les moyens humains ont été mis place, y avait-il quand même un manque d’effectif ?

Au niveau du labo, il y a eu des moments où on manquait d’effectifs. Il y a eu une seule création de poste. Le problème est que l’épidémie a des piques et rebaisse ce qui fait que l’activité baisse aussi. On a eu deux semaines au mois d’octobre où la demande de PCR était moindre donc on nous enlevait un peu de personnel et 15 jours après c’était carrément le pique de retour dans l’autre sens. C’est pour cela aussi qu’il y a un état de fatigue qui s’installe. A Questembert, c’est vrai que l’on a donné beaucoup de notre personne mais ça a été pris en compte. On était quand même contents que cette requête soit satisfaite mais je connais des labos de notre groupe qui ont été obligés de faire grève il y a quelques temps pour se faire entendre parce que c’était vraiment la débandade.

Est-ce que vous allez vous occuper des vaccins ?

Non, on ne fait pas la vaccination. Au laboratoire on prélève mais on n’injecte pas.

Que pensez- vous des vaccins ?

On a eu une directive, non officielle, précisant qu’en tant que secrétaire médicale, bien que non considérée comme personnel de santé, on sera normalement prioritaire malgré tout. Honnêtement j’ai envie d’attendre un petit peu, avoir du recul mais c’est un avis personnel. On nous incite à le faire car je pense que c’est malgré tout la solution actuelle pour avancer. Mais je crois qu’il faut vraiment que j’avance dans ce sens, j’irais me faire vacciner pour passer à autre chose et pour essayer de trouver des solutions si on ne les trouve pas par ces confinements, ces couvre-feux, ces barrières sanitaires.

Est-ce que cette crise a affecté votre vie personnelle ?

Il faut quand même relativiser, il y a plus malheureuse que moi. Je suis contente d’aller au travail tous les jours. Je pense aux gens qui n’ont plus de travail aujourd’hui donc non. Les premiers temps quand je rentrais de mon travail, je prenais beaucoup de précautions par rapport à mes proches. Je suis très vigilante, ça fait longtemps que je n’ai pas embrassé mes filles par exemple mais autrement je ne pense pas que ça a eu beaucoup d’impact. Peut-être une impression de boulot dodo, de la fatigue.

Est-ce que vous avez peur du variant ?

Ce n’est pas une bonne nouvelle quand même. On a été rassurés en nous disant que c’était moins lourd en conséquences. Cependant il est beaucoup plus contagieux, on se demande si les mesures ne devraient pas être durcies ponctuellement pour éviter ça. Personnellement ça ne m’a jamais fait peur parce que je n’ai pas de pathologies, mais ma plus grosse crainte est de la transmettre aux autres.

Est-ce qu’il y a eu de la solidarité de la part de la ville de Questembert envers vous ?

L’été dernier, un commerçant qui tient un kebab nous a dit « je n’arrête pas d’avoir des retours avec les questembertois (habitant de Questembert). Il semble que vous êtes très pris, que vous êtes moins disponibles qu’avant, j’ai donc eu envie de vous faire plaisir » et il est venu nous offrir un repas à chacun d’entre nous. C’était vraiment une belle surprise !

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