SAM VA : PHOTOGRAPHE HUMANISTE

Depuis un an, Sam Va, photographe professionnel, vit au jour le jour. Ce spécialiste des mariages installé à Saint-Malo, est aujourd’hui privé de son terrain de jeu : cérémonies annulées, reportées. Professionnellement, 2020 aurait du être sa meilleure année. Mais le Covid est passé par là.

Bonjour Samuel, pour commencer comment voyez-vous votre situation aujourd’hui ?  

Mon ressenti a complétement changé entre le printemps et maintenant. Au début de cette crise, il était compliqué de ne pas sombrer dans la dépression parce qu’on ne savait pas de quoi l’avenir allait être fait, comment on allait remplir le frigo. Aujourd’hui j’ai la possibilité de me dire que je peux encore tenir un petit moment grâce aux aides (si elles continuent) et grâce à de nouveaux projets. Pour autant, si le vaccin ne marche pas… ça va être très compliqué. Je vais même aller plus loin. Les bars et boites de nuits étant fermés, nous sommes privés de nos habituels lieux de rencontre. Il y a donc des couples qui ne se forment pas. Et sans couple, pas de mariage…

La profession s’est-elle précarisée ? 

Oui, nécessairement la profession s’est précarisée, mais comme bien d’autres ! Indépendamment de cette période critique, il faut savoir que le fonctionnement du photographe est instable et complexe en raison des nombreux statuts*existants. C’est pourquoi, lorsque les fonds de solidarité se sont mis en place, l’adaptation n’a pas dû être aisée. Ils ont finalement décidé d’adapter l’aide au plus grand nombre en faisant une moyenne par mois du chiffre d’affaire, ce qui m’a permis de m’en sortir. Malheureusement ces aides ne sont arrivées qu’en juillet. J’ai quand même perdu beaucoup. On a eu la chance d’avoir un syndicat soutenu par peu de photographes au départ au départ mais avec des gens qui ont fait un boulot énorme et qui ont réussi à sauver une bonne partie de notre profession.  Ce qui n’a pas empêché certain d’entre nous d’être dans l’obligation de prendre un boulot à côté pour arriver à joindre les deux bouts.

Pour sauver votre année avez-vous du augmenter vos tarifs ?

C’est compliqué. Augmenter serait une solution, mais dans certains cas ce n’est pas possible, dans le cas d’un report par exemple. Si le contrat a été signé en 2020 je ne peux pas obliger mes clients à basculer sur mes tarifs 2021. Pour autant, depuis le premier confinement il n’y a plus vraiment de demande pour les mariages, les gens attendent pour s’engager.

 Les annulations se sont-elles toutes transformées en report ?

Oui, il n’y a pratiquement eu que des reports de prestations. Si on s’était trouvés dans un cas dit de « force majeure », les contrats auraient été annulés. Mais les annonces sont sorties, et il s’est avéré que ce n’était pas un cas de force majeure. De ce fait je n’ai eu presque que des reports pour fin 2020 ou 2021. Je ne compte qu’une annulation. Mais c’est vrai que l’on comprend toutes ces personnes qui ne souhaitent pas se marier masquées. Dans des cas d’annulation je conserve l’acompte et le transforme en séance photo couple par exemple.

Ah ces masques …. Cela va-t-il modifier votre façon de travailler ?

C’est là où c’est compliqué. Dans mon cas, je cherche à photographier des gens qui se prennent dans les bras, donc je suis bien embêté (rire). Sur les mariages auxquels j’ai participé, c’était vraiment très variable. Certains sont très réticents, d’autres n’ont pas peur. Cet été, c’était relativement calme par rapport au virus et donc les gens se prenaient plus facilement dans les bras. Dans l’ensemble, je pense que c’est aussi compliqué lorsqu’on vit des moments fort comme ça de s’empêcher de s’enlacer.

 Cette crise vous a donc aussi amené à remettre en question votre travail ?

Certains disent « se réinventer », je trouve le terme un peu pompeux. Mais en effet, je voudrais aider à ma façon les petites entreprises à promouvoir leur travail à travers mes photos. Ce service pourrait s’adresser à des petits artisans touchés par la crise afin de les aider à développer leur image, leur savoir-faire. Dans le même temps, ça me permettra de développer mes revenus. je suis avant tout photographe et mon objectif est de m’exprimer avec mes images. Il aurait été possible de développer mes revenus auprès de grosses entreprises qui ont profité de la crise. Ce n’est pas ma philosophie.

Avec une économie en baisse, certains feront peut-être le choix de faire leurs photos eux-mêmes ?

C’est difficile à dire, pour ma part ce n’est pas du tout mon type de clients. Je n’ai pas envie de baisser les prix au point de réduire la qualité de mon travail. Pour les gens qui viennent me voir il s’agit des photos de leur vie, d’images vraiment importantes pour eux et ils n’hésitent pas à investir dans leurs souvenirs.

Comment envisagez-vous la suite ?

Je suis toujours inquiet mais paradoxalement j’ai beaucoup d’espoirs avec le vaccin. Mon métier touche à plusieurs domaines comme l’évènementiel, l’art, la culture donc c’est compliqué mais force est de constater qu’on a tout de même été bien aidés jusqu’à décembre. Aujourd’hui, les aides semblent plus compliquées à obtenir. L’avenir reste encore flou.

*Il existe en effet, deux catégories de photographes. Les photographes auteurs et les photographes artisans. La première catégorie est affiliée au ministère de la culture tandis que la seconde est en relation avec la chambre des métiers. A noter que les photographes artisans appartiennent depuis toujours au domaine administratif de l’évènementiel. Les photographes auteurs, eux, ont rejoint ce domaine uniquement depuis la crise épidémique et grâce aux démarches des syndicats. Cette nouvelle mesure permet depuis aux photographes auteurs de bénéficier des mêmes aides que les photographes artisans, c’est-à-dire,  un accès au fond de solidarité.

Ces informations nous ont été transmises par le syndicat des photographes (la FFPMI)

 

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