En France, depuis quatre ans et depuis le choc de la pandémie de Covid-19, la santé est au centre des préoccupations politiques. Les confinements à répétition ont mis en lumière les difficultés de notre système de santé pointant notamment la diminution du nombre de lits, le salaire insuffisant des soignants, la gestion de la fin de vie et enfin depuis 2022, les Ehpad. Il y a deux ans, le journaliste Victor Castanet publiait une enquête détaillée sur la firme Orpéa et la gestion parfois intolérable de certains établissements. Qu’en est -il aujourd’hui ?
Orpéa est une entreprise qui possède plus de mille établissements d’hébergement pour personnes âgées, dépendantes aussi appelé Ehpad. Pendant son enquête, Victor Castanet, a infiltré un Ehpad pour comprendre le travail de ces soignants, or, le constat final est terrifiant : rationnement des couches ou des produits de première nécessité, aides médicales ou soins d’hygiène insuffisants, relations aux personnes détériorées par le manque de temps. À la suite de cette enquête, la méfiance concernant ces établissements a augmenté drastiquement. Pour Amandine, infirmière dans un Ehpad Quimpérois, « la crise Orpéa a créé un véritable climat de tension qui augmente l’exigence de la part des familles, on a l’impression qu’on met tout le monde dans le même sac, comme si tous les soignants étaient tous comme ceux d’Orpéa ». Tout comme Amandine, Céline, ancienne infirmière dans un de ces établissements dans le public, ne fait pas le même constat que le journaliste, « le décalage est important par rapport à ce que j’ai pu connaître, dans mon Ehpad, il n’avait pas de rationnement des couches, on changeait quand il le fallait. » Depuis la sortie du livre « les fossoyeurs », les problèmes mis en lumière par Victor Castanet sont liés à Orpéa, mais pas seulement, our Céline, le problème se trouve ailleurs en général, « Pour commencer, il y a un vrai manque de personnel que ce soit dans le privé ou dans le public », un manque de personne, très visible, mais ce n’est pas le seul problème « les gens arrivent encore plus dépendants qu’avant », c’est simple, « le nombre de soignants diminue et les personnes qui arrivent dans l’ Ehpad sont beaucoup plus dépendantes ». Une réalité que Remarque également Martine, évaluatrice APA (Allocation personnalisée d’autonomie), « l’ Ehpad représente la dernière maison […] en général, les gens veulent rester le plus longtemps possible dans leur foyer avec leur famille, leurs meubles, leur confort tout simplement ». Martine travaille avec le conseil départemental du Morbihan, pour trouver les meilleures aides pour les personnes âgées, elle, évoque un classement GIR correspondant au niveau d’autonomie et donc au niveau d’aides fournies. Le Gir, c’est un classement entre 1 et 6. À 6, le résident est autonome de ses mouvements, de ses gestes et n’a pas de problèmes dit cognitifs (correspondant avec les maladies telles que Alzheimer). « En dessous de 4, cela signifie qu’ils sont en perte d’autonomie, ils ont donc besoin d’un peu d’aide » Une aide qui correspond à des soins médicaux ou des aides à la toilettes et d’hygiène pour les plus dépendants à confectionner des plats pour ceux qui ont moins. Un fonctionnement financier par la sécurité sociale et qui donc permet à ceux qui veulent de rester le plus longtemps possible chez eux.
Une crise plus profonde…
La crise Orpéa concerne donc évidemment les établissements d’hébergement pour personnes âgées, dépendantes, mais cela implique également un problème global pour notre système de santé. Selon Amandine, « il y a un énorme problème de moyens : l’hôpital est surchargé, on n’a pas assez de moyens humains ou financiers, les soignants ne peuvent pas faire face à la demande. ». En effet, depuis la pandémie de Covid et le confinement, la santé est devenue un sujet important pour le gouvernement français. Durant cette période de crise, le pays a compris l’importance de nos soignants, les applaudissant chaque soir à 20 h pendant le confinement. Une période au cours de laquelle les politiciens de chaque bord politique, ont applaudi leurs efforts. « On va dire que durant le Covid, il y a une vague de popularité pour les soignants », constate Amandine. Mais qu’est ce qui a véritablement changé ? Les salaires, ont-ils augmenté ? Les conditions de travail, ont-elles évolué « On a été valorisé suite à la crise, mais pas dans tous les secteurs » « Est-ce que la valorisation a été suffisante par rapport aux conditions de travail, moi, je dis que non ». De plus, les promesses gouvernementales réalisées pendant la crise ne sont plus d’actualité. Le ministre de la Santé, Olivier Véran, avait annoncé la fin du dogme de la fermeture de lits d’hôpitaux. La réalité ? Plus de 6 000 lits fermés en 2022, et la tendance 2023 semble aller dans le même sens. En vérité, fermer des lits d’hôpitaux, c’est une mesure guidée par plusieurs critères. Dans un premier temps, la volonté du gouvernement de favoriser les hospitalisations courtes de moins de 12 h. Un objectif majeur pour le ministère de la Santé. Un objectif qui a augmenté le nombre de résidants dans les Ehpad. Cependant, la raison de ces fermetures est avant tout financière, annuellement, la sécurité sociale fixe des objectifs dans le sens d’une baisse des dépenses des hôpitaux. En 2019, l’objectif était estimé à un milliard d’euros. Bien que le Covid ait perdu son statut d’urgence sanitaire, la santé est encore un point sensible de notre république où les difficultés s’accumulent et où les promesses s’effondrent.