COUPE DU MONDE DE RUGBY : ÉRIC FRY DE VANNES AU JAPON

A 32 ans, Éric Fry est le pilier du RC Vannes. Après une grave blessure au genou lors de la saison 2018-2019, ce colosse américain à la longue barbe rousse a retrouvé sa sélection nationale lors de la Coupe du Monde de rugby au Japon, cet automne.

Vous avez débuté votre carrière aux États-Unis, le rugby a-t-il toujours été une évidence pour vous ? 

Pas vraiment ! Il y a plusieurs années, le rugby n’était pas autant développé qu’à l’heure actuelle aux USA. Pendant mon enfance, j’ai grandi avec le football américain. Ma mère voulait que moi et mes trois frères pratiquions ce sport. Puis à 14 ans, j’ai découvert la culture du rugby, et ce fut une véritable révélation. Quand j’ai quitté l’université pour aller à Las Vegas, je n’imaginais pas jouer à un haut niveau de compétition en tant que professionnel.

Quel a été votre parcours avant d’arriver au RCV ?

J’ai commencé ma carrière professionnelle en 2009 au Las Vegas Blackjacks Rugby Football Club, puis je suis passé par la Nouvelle-Zélande. En 2012, j’ai rejoint l’Angleterre où j’ai joué pendant quatre saisons pour le London Scottish et le Newcastle Falcons. Après un retour dans mon pays natal en 2016, je suis venu en France à Saint-Nazaire en Fédérale 1[1]. Après le dépôt de bilan du club pour des raisons financières, Vannes a fait appel à mes services en tant que joker médical. Je suis donc très content d’être dans le Morbihan et de jouer pour le RCV depuis quatre ans maintenant.

Vous avez participé à votre 3ème coupe du Monde au Japon, est-ce toujours un moment particulier dans une carrière ?

Oui évidemment, à chaque fois c’est un réel plaisir de pouvoir participer à une Coupe du Monde avec les États-Unis et de retrouver les copains de la sélection.

Il s’agissait de la première coupe du Monde de l’histoire, organisée en Asie, quel souvenir allez-vous en garder ?

C’était incroyable ! Le monde du rugby était réuni et a pris beaucoup de plaisir. L’organisation Japonaise a été fantastique à la fois pour les joueurs et les spectateurs. En effet, de nombreuses fan-zones dans les villes permettaient de regarder les matchs et de faire la fête comme si on était à l’intérieur des stades. Les gens étaient extrêmement sympathiques, leur hospitalité m’a réellement touché. C’était vraiment intéressant d’expérimenter une autre culture comme ça l’est d’ailleurs pour moi en France, mais découvrir le Japon était quelque chose de spécial.

Aviez-vous beaucoup de supporters américains présents au Japon ?

J’ai bien évidemment eu le soutien de toute ma famille, qui est venue voir les matchs, et également de nombreux clubs de rugby étaient présents pour soutenir leur nation. Oui globalement, il y avait un bon groupe d’Américains sur place pour encourager notre équipe.

Le 2 octobre dernier, vous avez affronté l’équipe de France pour votre second match dans la compétition, quel regard portez-vous sur cette rencontre ?

C’était génial de pouvoir jouer contre des amis. Quand j’ai découvert que nous étions dans le même groupe au moment du tirage au sort, mon objectif était de jouer ce match. J’ai tout fait pour être de la partie, surtout après ma blessure la saison dernière. En ce qui concerne le résultat, je suis un compétiteur donc je suis un peu déçu, surtout parce que nous avons très bien joué durant 65 minutes. Le score a été décevant (défaite 33 à 9) mais nous avons joué notre meilleur match du tournoi. Nous avons su montrer un beau visage et c’est le plus important.

Votre équipe a su résister pendant plus d’une heure aux assauts français, pensez-vous que les USA progressent depuis votre première coupe du monde en Nouvelle-Zélande en 2011 ?

Je pense que nous devenons de plus en plus compétitifs chaque année. Les choses se sont accélérées avec la création de la Major League Rugby qui a vu le jour aux États-Unis, fin 2017. Dorénavant, les stars du rugby peuvent jouer au plus haut niveau sur le sol Américain. Avant, nous avions une équipe avec des joueurs très athlétiques qui travaillaient très durs, mais qui manquaient d’expérience. Maintenant, nous avons un collectif composé à 100% de joueurs professionnels. Leur expérience est beaucoup plus grande parce qu’ils jouent des rencontres en compétition chaque week-end.

Votre nation a été éliminé dès le 1er tour, quels étaient vos objectifs avant le début du mondial ?

Nous n’y sommes pas allés la fleur au fusil. Nous étions conscients du niveau très élevé de cette compétition et l’objectif premier était d’y participer. Bien sûr, nous aurions voulu gagner contre les Tonga, qui était probablement l’équipe la plus abordable du groupe, mais nos adversaires ont très bien joué et l’ont emporté. La rencontre contre l’Angleterre était différente car c’était un match très compliqué face à l’une des meilleures nations au monde. Je pense qu’ils ont joué leur meilleur rugby pendant cette rencontre et nous le pire, mais ce fut un bon test pour notre équipe.

Un typhon a frappé le pays durant votre séjour au Japon, comment l’avez-vous vécu ?

Par chance, il ne nous a pas affecté énormément car nos rencontres ont été maintenues. En revanche, on a eu un temps de repos entre le match contre l’Argentine et celui des Tonga. Avec les conditions météorologiques, on ne pouvait pas quitter l’hôtel. C’était frustrant mais c’est la météo, on ne peut rien y faire.

Aujourd’hui, vous êtes de retour à la maison après quatre mois et demi d’absence, le RCV connaît une première partie de saison en demi-teinte, avec de nombreuses défaites à l’extérieur, qu’en pensez-vous ?

Oui en effet, c’est un début de saison compliqué à l’extérieur. Je n’ai pas pu voir toutes les rencontres étant au Japon. Nous ne commettons pas beaucoup d’erreurs à la maison mais à l’extérieur, c’est plus compliqué. Dans les zones où il faut marquer, nous avons perdu trop de ballons. Dans les zones défensives, nous avons souvent bien défendu mais d’un coup on manque un plaquage, et cela nous fait perdre une rencontre. Il ne faut pas s’autoriser ce type de petites erreurs qui nous font perdre des points. Néanmoins, la saison est encore longue et je pense qu’il ne faut pas paniquer.

Après des play-offs réussis l’an passé, quels sont les objectifs du club pour cette nouvelle année ?

Nous espérons faire aussi bien que l’année dernière en se qualifiant une nouvelle fois pour les play-offs. Nous avons réussi un très beau parcours l’an passé et le club souhaite revivre cette belle épopée.

Avec la montée du club à l’échelon supérieur en 2016, le rugby est devenu incontournable à Vannes, êtes-vous fier de participer à son développement ?

Oui tout à fait, je suis très fier de faire partie du club aujourd’hui. Je trouve incroyable le soutien que le RCV reçoit ici, à Vannes, et dans toute la Bretagne. J’ai joué à Newcastle en première division anglaise et le soutien que l’on reçoit à la Rabine est bien meilleur. Je suis donc très honoré et fier de faire partie du projet. Après les matchs, j’adore pouvoir échanger avec les supporters et ressentir leur enthousiasme.

À ce stade de votre carrière de joueur, quels sont vos objectifs sportifs ?

Mon rêve serait d’amener le RCV à jouer en TOP 14 dans les prochaines années. Pour le moment, je souhaite rester en bonne santé et éviter les blessures. J’ai juste besoin de jouer et de retrouver de bonnes sensations.

Avez-vous envisagé la suite après la fin de votre carrière de rugbyman ?

C’est une question difficile. Plus jeune, j’ai travaillé dans l’investissement immobilier à Las Vegas donc pourquoi pas y retourner plus tard, mais pas dans l’immédiat. Je veux d’abord passer du temps en France et découvrir davantage le pays. Ma petite-amie est anglaise et elle a sacrifié sa carrière pour me suivre dans ma vie de rugbyman donc nous irons sûrement en Angleterre quelques temps avant de retourner aux États-Unis.

[1] 3ème division nationale

 

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